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fallacieuses chroniques de la vie parisienne
7 décembre 2011

Sa-lo-pe

Mercredi, 18 heures.
Je marche tranquillement dans le Forum des Halles, ce gros centre commercial grouillant, repère des étudiants, parisiens, touristes flics et racailles, me repassant en film ma journée dans ma tête embuée de noms, dates de naissances, adresses de notaires... Quand un homme se dirige vers moi. La trentaine, français (je vois poindre le nez des téléspectateurs de TF1), style vestimentaire commun, et même des lunettes, accompagné d'un ami qui reste à l'écart.

- Excuse moi, je cherche un cadeau pour ma petite soeur.

J'ai d'abord envie de répondre que j'en ai rien à battre et qu'il n'a qu'à ouvrir ses petits yeux pervers (il a des yeux pervers) pour trouver une boutique sympa. Autour de nous, à vue de nez il y en a minimum trois.
Puis de le gifler, on est pas à Rungis, et ça ne se fait pas de regarder une femme comme ça. Non pas que je me considère comme une femme, disons jeune femme. Ou jeune fille. Bref.


Mais non, pas de temps à perdre, je l'ignore superbement, sans même un regard méprisant et continue ma route.
C'est là qu'il lâche ce mot. En détachant bien les syllabes, pour que les passants l'entendent, pour qu'il me frappe, pour que je prenne tout son sens en pleine face.

- SALOPE

Tout se passe très vite, à vrai dire je ne réfléchis pas, je fais volte face et marche d'un pas plus qu'énergique en sa direction.

- Tu as dit quoi là ? HEY REVIENS !! Et répète moi ce que tu as dit !

Un peu désarçonné le minable se retourne et comprenant que je ne lâcherai pas l'affaire, fonce sur moi avec un faciès rougeaud que je ne lui connaissais pas.

- T'as entendu !
- Tu insultes les gens comme ça ? Mais pour qui tu te prends ?! Tout ce que j'ai fais c'est de ne pas te répondre, et tu me traites de salope ?

Impatient, passablement énervé il fait mine de se rapprocher en ne me lâchant pas du regard, comme pour me mettre un coup de tête. Moi, je ne bouge pas. A vrai dire je n'attend qu'une chose, qu'il lève la main sur moi. Là je pourrai lui casser la gueule.
Je me remémore rapidement un enchaînement crochet-uppercut, me demande si je suis à bonne distance, pense à laisser tomber mon sac au sol pour l'élément de surprise et avoir plus d'aisance.

Mais rien. Déception.
- Vas-y laisse tomber.
Signe rageur de la main et demi-tour de l'apprenti caïd

- Tu t'en vas comme ça ? CONNARD
J'ai songé au "fils de p*te", mais à deux contre un j'aurai peut-être eu un plus de mal. 
 

Il s'éloigne, je fonce dans un magasin en sens opposé avant d'en sortir rapidement. Trop de colère, de rage, j'ai l'impression que je peux enchaîner 2 kaméhaméha facile. Il y a quelques années, à mon arrivée à Paris, ce genre de rencontre était hebdomadaire et se finissait sans encombres. Il y a eu des joutes verbales, des insultes, des menaces, des personnes pour s'interposer et la Haine retombait.
 

J'ai tourné pendant une demie-heure dans Chatelet, à se recherche. J'ai cogité, trouvé des répliques percutantes, en errant entre les soutiens-gorge, les pulls à grosses mailles et sac à main fluos. Même un enchaînement de coups qui le laisserait le souffle coupé et les noix broyées.
C'est toujours ce qu'on fait, on trouve les mots justes bien après, on crève d'envie de réécrire l'histoire, de sécher l'importun, de le mettre face à son reflet, lui faire comprendre qu'il ne vaut rien.
Évidemment ma quête est restée vaine, et mes questions sans réponses.

Je me suis fait traiter de salope parce que j'ai refusé à un mec de l'aider dans sa recherche bidon de cadeaux. "Connasse" encore, admettons, j'aurai laissé filer avec un "gros con" bien senti, mais "salope" ? Il lui est arrivé quoi à ce type pour qu'il insulte une inconnue en plein milieu d'un centre commercial ?

Aborder une fille comme ça, c'est un jeu, un rite de passage dans certaines cultures, et en aucun cas l'homme ne doit se montrer violent ou désobligeant. Lui, il l'a fait comme ça, sur un coup de tête. Il attendait peut-être sincèrement une conversation, un café, ou alors une occasion supplémentaire d'exprimer sa colère envers les Femmes, de les dominer. Je penche plus la dessus.
Il s'est senti castré, renié dans sa virilité, peut-être même humilié.

Il n'y a rien de pire que l'indifférence dit ma grand-mère. 
Je la crois volontiers, mais je me sentirais tellement mieux si j'avais pu lui envoyer une bonne droite. 

 

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Commentaires
O
Une droite ou une giffle pour l'insulte aurait pas été de trop, ça suffisait amplement ;)
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